Royaume de l’or et des épices de l’Orient d’hier, Terre des Caravanes du sel de Taoudeni d’aujourd’hui, le
Mali, cet immense pays d’Afrique dite « Sub Saharienne », est avant tout un pays mosaïque, où s’entremêlent en permanence d’innombrables ethnies, langues et cultures différentes.
Autant de richesses, autant d’occasions de rencontres inoubliables : Toutes nos Rencontres ne sont-elles pas autant de
Voyages ?
Du haut de la falaise de Bandiagara, rencontre avec les mystérieux
Dogon, « Le Peuple des Falaises ».
Récit de deux mois d’Aventure et de 300 km de Marche à pied.
Baobab, l’Arbre Roi.
Arbre Roi du
Pays Dogon, le baobab - de l’arabe « Bu Hibab » - se décline aussi bien pour le bien être des vivants que pour le repos des morts. Son fruit, le Pain de Singe, à la forme ovale et à l’écorce dure, protège une chair blanche et filandreuse, au goût crayeux et acide, en raison de sa haute teneur en vitamine C. Mélangée à du lait, ses vertus médicinales sont reconnues pour lutter contre les accès de fièvre et les crises de dysenterie.

Les défunts bénéficient aussi des multiples usages offerts par le baobab : Sur une hauteur d’environ un mètre, les villageois du Pays Dogon lacèrent le tronc des arbres.
Grâce à son écorce particulièrement fibreuse, ils fabriquent et tressent des cordages qui leur servent, par exemple, à hisser leurs morts, enveloppés dans une couverture en damier noir et blanc, jusque dans des cavités et autres grottes creusées à même la
Falaise de Bandiagara, parfois à des hauteurs vertigineuses.
Et comme, décidemment, rien ne se perd et tout se transforme en Afrique, les enfants Dogon ont eux aussi trouvé un autre usage aux innombrables pains de singes providentiellement tombés de l’Arbre Roi : Après avoir creusé de petits trous quasi invisibles dans l’écorce du fruit et l’avoir, patiemment, vidé de sa chair blanche comme on gobe un gros œuf, ils ne laissent à l’intérieur que les graines du baobab.
Il leur suffit alors de le secouer frénétiquement à la façon d’une maracas version africaine, le transformant ainsi en un improbable instrument de musique, qu’ils vendent aux touristes de passage.
Salutations Dogon.
On ne plaisante pas avec les formules de politesses au Pays Dogon.
Bien loin de nos réflexes sociaux occidentaux très vite expédiés, qui sortent rarement du sommeil de la langue (« Bonjour, ça va ? »), chaque rencontre entre Dogon est à ce point codifiée dans un respect mutuel que les présentations peuvent durer plusieurs minutes ! Véritables « Joutes » oratoires en forme de questions-réponses débitées sans une seule seconde de temps mort, les politesses de présentations Dogon tiennent autant du ping-pong verbal que du concert à deux voix, à rythme (très) accéléré.
Extraits (en Dogon dans le texte) d’une langue qui comporte plus d’une dizaine de dialectes, dont le « Sigiso », une langue secrète, utilisée par les « Masques » lors des cérémonies religieuses :
- (A la cantonade) : Poï ! (« Bonjour » !)
- (Réponse des hommes) : Owa ! Agapo ! (« Bonjour » !)
- (Réponse des femmes) : Ow ! Digapo ! (« Bonsoir » !)
- Ousewo ? (« Comment vas-tu ? »)
- Séwo ! (« Ça va ! »)
- Oumanon séwé ? (« Comment va ta famille » ?)
- Séwin ! (« Ça va ! »)
- Yanawo séwo ? (« Comment va ta femme ? »)
- Séwo (« Ça va ! »)
- Ounouwo séwin ? (« Comment vont tes enfants » ?)
- Bilapo, séwin ! (« Ça va, merci ! »).
Le Pays où les greniers ont un Sexe.
Proportionnels au nombre d’habitants et à la richesse de chaque famille, chaque
village Dogon possède ses propres greniers, identifiables grâce à leur base surmontée de quatre grosses pierres, et à leurs petits toits coniques de paille, fait de seko.

Pouvant contenir jusqu’à trois récoltes, les greniers du Pays Dogon sont « bisexués » : Les greniers mâles, les plus grands, sont exclusivement destinés à stocker le mil, une des principales céréales du Mali.
Les greniers femelles, plus petits et auxquels les hommes n’ont pas accès, sont séparés à l’intérieur par quatre cloisons, qui permettent la conservation des arachides, du sorgho (le gros mil), du fonio (le « Po », considéré comme « Le Germe du Monde ») et du mil, ainsi que le stockage des condiments et de divers ustensiles de cuisine.

Toguna, la Maison Anti-Colère.
La Togouna (ou To Gunna) est la Maison à Parole, la « Case à Palabres ».
Généralement bâtie à proximité de la place principale du village, c’est une construction carrée typiquement Dogon, orientée nord-sud, exclusivement réservée aux hommes après la circoncision, et plus particulièrement aux anciens, qui s’y réunissent pour discuter affaires ou litiges.
A la fois lieu d’échanges, maison où se transmet la Tradition orale et tribunal, son toit est bâti par huit épaisseurs successives de bottes de mil, et supporté par huit piliers en pierre ou en bois sculpté de symboles, correspondant aux huit ancêtres primitifs Dogon, et répartis en trois rangées.
Sa taille, volontairement basse et limitée à une hauteur d’un mètre vingt, oblige les hommes à rester assis et interdit la colère : En se levant brusquement sous le coup de l’emportement, on se cognerait le crâne.
La vraie Parole, pour les Dogon, est la Parole prononcée assise, donc la parole Sage.
Ce Texte, ces Photo et ces Croquis de Voyages sont extrait de mon
Livre Photo au Format Magazine Je Reviens de Loin
à suivre, Amayabieï… (« Si Dieu veut… ») - Lire l'Article complet Texte et
Photos du Mali
L'Homme qui Marche
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